Soirée en compagnie d’Anice Lajnef, ex-trader : vendredi 25 juin 2021 20h

Au programme de cette visio :
Présentation d’Anice Lajnef*Quels sont les impacts de la spéculation sur l’économie ? Immobilier, cryptos, inflation du moment…La dette en bout de course comment en sommes nous arrivé là ? Pourquoi le capitalisme va-t-il s’en tirer ? Un Great Reset via les Banques Centrales se dessine-t-il ? Quelle forme pourrait-il prendre ? Prépondérance et rôle de la monnaie dont le code source, les règles, les fonctions pourront être (re)programmés. Comment nos monnaies locales complémentaires et citoyennes peuvent elles agir en pare-feu ? Leurs rôles, les effets de leviers possibles… Comment assurer une fonction démocratique de la monnaie, au service de l’intérêt général à l’heure du tout digital ?

*Anice Lajnef ancien trader de la Société Générale à Paris puis chez Nomura, la Banque japonaise qui a racheté Lehman Brothers en 2008, il a achevé sa carrière à la Barclays de Londres. Avec 18 années dans les salles de marchés, un bagage mathématique conséquent et un bon sens tout ce qu’il y’a de plus terrien, notre homme a toujours porté la volonté d’agir avec équité et il a refermé la porte de cet univers après avoir pris conscience de l’impact de ses décisions sur la vie réelle de ses contemporains. Il cite souvent un acte de spéculation qui aura fragilisé un grand groupe français et provoqué plusieurs milliers de licenciements… en ayant simplement piloté l’action depuis son bureau.

Il a fait choix désormais de se consacrer professionnellement à ce qui fait sens pour lui et pour l’homme : développer la confiance, qui est la base même de la fonction monétaire sans laquelle l’échange n’est pas possible ou du moins pas bénéfique aux parties et donc pas durable… la stabilité de nos civilisations tient pour beaucoup à notre capacité à échanger pour satisfaire les besoins, gage de paix. Il se consacre aussi largement à transmettre ce qu’il sait de la finance, de la monnaie, de l’impact sur nos vies de la dette et des politiques monétaires conduites par les états et les magnats de la finance. Passant du pilotage de ces politiques dans l’intérêt des plus gros portefeuilles de la planète à un intérêt sincère et plein d’empathie pour Monsieur, Madame tout le monde, le gilet jaune du coin comme le patron de PME, le fonctionnaire comme l’ingénieur, Anice se propose de repenser la monnaie pour refonder ce lien symbolique de nos sociétés.

Rappelons rapidement les 3 fonctions de la monnaie selon Aristote : unité de compte permettant de mesurer la valeur d’un objet, moyen d’échange et réserve de valeur pour les différer. Sa vision de la monnaie traduit finalement ce qu’est la monnaie, cet instrument qui semble toujours le même mais qui porte pourtant dans ses règles de fonctionnement une idée de ce qu’est l’homme pour l’homme et ici bien souvent pour l’homme qui domine.

Nous touchons ainsi au cœur du sujet considérant que l’actuel “argent dette” correspond bien à la définition que porte notre société du 21ème siècle mondialisée de ce que doit être l’homme en tant qu’outil de production et de consommation. Où l’être est asservi à une puissance possessive, elle-même nourrie par les désirs du plus grand nombre qui concourent à la renforcer et dont seule une infime portion de notre humanité, in fine, dispose de cette manne qui les autorise à peser sur la vie des hommes, disposant par leur travail de leur temps, par la force démultiplicatrice de la dette de la richesse qui sera créée par nos descendant, empruntant à l’avenir du monde pour s’en emparer dès aujourd’hui. Ce capital asservissant a été appelé à se renforcer avec la complicité des états ces 30 dernières années tout particulièrement avec la mise en place de mécanismes macro-économiques qui facilitent l’accès des plus riches aux liquidités toujours plus abondantes… Gageant la Terre, comme l’accès aux terres et à ses habitants étaient l’apanage des cercles féodaux du moyen âge, l’accès aux outils de production celui des milieux bourgeois vainqueurs des révolutions qu’elles soient nationales ou industrielles, celui des colonisateurs pour l’accès aux matières premières, pour finir par les complexes militaro-industriels chers à Eisenhower qui détenaient les outils et les moyens de production après guerre.

Aujourd’hui la caste des possédants est celle de la finance avec ses outils réservés à ceux qui peuvent s’offrir les services d’une armée de calculateurs humains et numériques qui opéreront pour eux les transactions gagnantes sans se soucier de la moralité ou de l’impact de leurs actes… ou qui, comme un Soros, un Gates, sauront pertinemment peser sur la géopolitique internationale, sur la culture pour influer sur le destin des masses dans le sens de leurs intérêts. Gageons qu’à ces hauteurs de vues l’absence de dessin n’existe pas.

Ce schéma n’est pas nouveau, il n’est que plus criant tant les proportions sont devenues infâmantes et la complicité des états, de part pour le moins leur impuissance manifeste, est criante. Ces derniers nourrissent la bête insatiable par de l’injection monétaire de plus en plus massive qui maintien le semblant de vitalité du système socio-économique, par la magie du ruissellement dit-on… Nous observons plutôt la formation d’une masse monétaire orageuse qui n’annonce rien de bon. Sans ces doses de plus en plus conséquentes 2000 milliards en 2008 à 10 000 milliards de par le monde en 2020, le colosse s’effondrerait provoquant famines et guerres. Conséquences immédiates, la hausse des matières premières, de l’immobilier, du coût de la vie pour le lambda qui n’a plus aucune marge de manœuvre et semble emporté vers le précipice d’une faillite globalisée.

Ce gouffre Anice l’entrevoie et soutien l’idée qu’une autre définition de l’homme, de sa relation à l’avoir et à l’argent peut permettre de réorienter l’axe de nos sociétés et nous inciter à reconsidérer ce qui fait sens véritablement. Pour cela il faudra sortir de l’usure, de la spéculation, du court-terme, de l’intérêt privé égoïste pour faire la place au don, à la confiance, à la vision collective, à l’intérêt général et au bien commun… sans pour autant abandonner l’idée de capital, de liberté d’entreprendre ou de concurrence.

Toutefois le système lui aussi conscient de sa fin prochaine, du moins dans son état actuel, nous concocte une autre version de la monnaie, une version hyper contrôlée avec les blockchains où toute transaction est certes sécurisée mais aussi suivie de fond en comble et mémorisée, une version qui mettra davantage encore au banc de nos sociétés ceux qui ne peuvent s’offrir le luxe de l’éducation, de bénéficier d’un avoir suffisant à la naissance, une société avec un revenu universel de base pour maintenir une masse de personnes suffisante sous anesthésie par le jeu, les réseaux sociaux et les artifices de bonheur qui permettent de nourrir les aspirations non moins déréglées des possédants.

Ainsi les paradigme en présence s’opposent et avec l’inertie propre à la masse, opposée à l’agilité de celui qui est préparé et équipé pour la bataille, il n’est pas difficile d’imaginer lequel de ces deux système sortira vainqueur. Nous avons toutefois en tant que citoyens le devoir de l’utopie et devons avoir la résolution de l’incarner.