Deux voies s’offrent à l’Europe, chacune des deux aura une teinte verte, couleur tendance confirmée démocratiquement par les dernières élections municipales. Toutefois l’une serait plutôt bio, du genre respectueuse de l’homme et de son environnement… l’autre, se veut avant tout libérale et financière. Celle que nous emprunterons sera sans doute un savant entre deux à l’efficacité incertaine. Cette série de 3 articles se propose d’explorer les logiques et quelques limites de ces différentes solutions.
En marche vers une nouvelle économie ? 1/3
Raccourci vers la planification économique et écologique 2/3
Prochainement Un entre deux qui ne marchera pas… 3/3
2) Short way to a Green New Deal*
Sur cette autoroute se propose un *raccourci vers la planification économique (en mode Nouvelle Donne de Roosevelt) à la sauce “verte” qui semble être la seule sortie plausible offerte à nos économies mondialisées. Cette voie est explorée par les démocrates US et notamment en France par Arnaud Montebourg, les économistes atterrés, la France Insoumise et nombre de Think tank et d’économistes.
L’issue “favorable” pourrait être, selon eux, une nouvelle économie verte. Ce “Green New Deal” pour être efficace devra inclure des outils monétaires et financiers enclenchés par la BCE et soutenus par les états dans une logique de relocalisation de la production.
Il est concrètement envisagé : l’émission de masses monétaires dédiées au verdissement des outils de productions de l’économie (soutenu en France notamment par les travaux de Michel Aglietta, Piketty, Dufrêne, Grandjean, Giraud et l’institut Rousseau ici l’entrevue de Gaël Giraud avec le Sénat...) l’émission d’une masse monétaire découplée de l’économie de marché, principe du Glass–Steagall de séparation des banques d’affaires des banques de dépôts avec une monnaie dédiée à des usages non financiers comme la culture, l’alimentation… le principe étant de sanctuariser ce qui est vital ou non marchand de l’économie financière en découplant les monnaies spéculatives et marchandes de monnaies de biens communs, d’utilité sociale ou d’ordre culturel pour ne pas soumettre ces secteurs aux contraintes du marché. Il s’agit d’introduire une forme de diversité monétaire gage d’une meilleure résilience économique et sociale (Bernard Lietaer, Viveret, Derruder…).
Bien que peu probable ces scénarios auraient le mérite de sécuriser l’économie au détriment de la sacro-sainte finance. L’émission d’une masse monétaire d’investissement non remboursable, variante proposée par notamment Jézabel Couppey-Soubeyran, passerait notamment par l’instauration d’une prime aux entreprises et ménages leur permettant de consommer, voir même de consommer flécher.
L’on peut prendre pour exemple dans le cadre d’un programme de rénovation énergétique des habitations des ménages et des bâtiments de collectivités l’émission d’une masse monétaire “verte” ayant une correspondance connue en euro mais non convertible, ou du moins selon la règle que l’Etat décidera… Dès lors, des collectivités perçoivent des subventions en “verte”, les particuliers des aides (comme celles qui existent en Euro pour l’heure) ; ces acteurs économiques peuvent aussi contracter des emprunts en “verte” que seules les entreprises répondant à la norme RGE (Reconnu Garant de l’Environnement) par exemple (c’est aussi le cas aujourd’hui) peuvent percevoir. Dans le prolongement, seuls les industriels proposant des matériaux qualifiés (disons toujours) de RGE peuvent aussi percevoir des “verte”. L’Etat exigerait ainsi que 30% à 40% des dépenses de rénovation soient soldées en monnaie “verte” et c’est toute la filière qui se verrait obligée de se conformer à un cahier des charges que l’on appellera aussi ici RGE pour faire simple. Avantage, structurer des filières, augmenter localement les moyens de production ici RGE, atteindre les objectifs (notamment du Plan Climat) rapidement par cet effet de levier. Si l’on continue à pratiquer le même système d’aides à la rénovation énergétique avec de l’euro, toutes les marges restantes iront sur les comptes en banque et ne seront pas réinvestis ou si elles le sont, elles ne le seront pas de façon fléchée et ce seront assurément d’autres secteurs économiques, souvent moins vertueux, qui en bénéficieront.
Nous aurions là, il est vrai, un véritable levier qui permettrait d’éviter d’aller “bêtement” taper dans l’épargne des particuliers (il est question de prélever 10% sur toute l’épargne au delà d’un seuil qui a Chypre avait été de 100K€ mais serait bien moindre en France a priori) pour relancer l’économie. L’idée suppose néanmoins d’encourager parallèlement le recourt à l’épargne voir à la dette ; en effet, même si on injecte des milliards de “verte” pour le bâtiment ou pour l’agriculture, ce ne serait qu’une monnaie complémentaire incitative qui, en soit, ne serait pas suffisante pour financer notamment l’emploi, les impôts etc. Cependant l’on peut imaginer qu’une part raisonnable de cet argent pourrait être ici versé en “verte” pour s’acquitter des salaires ou permettre la perception en “verte” d’une partie des impôts des professionnels accompagnant pourquoi pas un circuit de destruction de la masse monétaire si une régulation devient nécessaire pour éviter l’inflation.
Voilà qui ressemblerait à une réponse européenne concrète dans la perspective d’enjeux mondiaux inhérents à la préservation de la planète… Une politique économique en somme.
Une autre déclinaison de cette monnaie hélicoptère (Paul Jorion notamment a une approche raisonnée de la chose) est l’établissement d’un Revenu de Base. Le risque inflationniste d’une telle politique est à souligner car augmenter tous les foyers les plus pauvres (chouette j’en fais parti) reviendrait à terme à une réévaluation des produits, charges… d’autant selon le un principe d’ajustement des prix aux capacité du marché repréré par Adam Smith qui, pour le coup, voyait assez juste dans un cadre économique fermé et non financiarisé à l’excès comme c’est aujourd’hui le cas.
Ainsi la réponse semble reposer dans :
- le rôle donné à la monnaie en instaurant des règles saines (prolongement du travail de Bernard Lietaer à l’origine du renouveau des Monnaies Locales Complémentaires dans le monde) ;
- le renfort de l’outil productif local à destination en priorité du local en vue de permettre la résilience et la réduction de l’empreinte écologique (tout reste à faire) ;